LE SERMON D’ÉTIENNE
« Ils produisirent de faux témoins, qui dirent...nous l’avons
entendu dire que Jésus...détruira ce lieu, et changera les
coutumes que Moïse nous a données. » (Actes 6.13-14)
Les prédicateurs du Nouveau Testament « trouvaient » Christ dans les prophéties messianiques et les types et images de l’Ancien Testament. Ils le voyaient également dans des textes qui, à première vue, n’ont rien à voir avec le Seigneur Jésus-Christ. Nous voulons nous pencher plus spécifiquement sur cet aspect de la pratique néotestamentaire afin de l’examiner de plus près, et nous le ferons en nous servant du discours d’Étienne que nous rapporte le chapitre 7 des Actes.
Une leçon d’histoire ?
D’après les accusations portées contre lui, Étienne avait manifestement l’intention de prêcher Christ. Or, son long sermon (plus de 50 versets) ne fait aucune mention de Jésus ou de Christ ! Il se présente comme une simple leçon d’histoire. Certes, il fait une brève référence à Christ en parlant du « prophète comme » Moïse (v.37) et du « Juste » (v.52). C’est d’ailleurs cette dernière affirmation qui déclenche la colère de ses persécuteurs et les amène à le mettre à mort. Mais dans l’ensemble, Étienne semble se contenter de rappeler l’histoire de l’Ancien Testament sans pour autant en tirer d’application évidente concernant Christ. Prêche-t-il cependant Christ ? Oui, certainement, et il le fait tout au long de sa défense devant le sanhédrin, en dépit des apparences.
L’emploi qu’Étienne fait de l’histoire pour prêcher Christ est particulièrement significatif parce que les sections historiques de l’Ancien Testament semblent souvent dénuées de tout contenu christologique. La loi, elle, regorge de types et d’images de Christ. Les Psaumes débordent d’espérance messianique. Les prophètes témoignent clairement de celui qui doit venir. En revanche, on se demande souvent où Christ est présent dans les parties narratives de l’Ancien Testament.
Un principe d’interprétation
De prime abord, ces récits ressemblent à un désert dépouillé de tout indice pour celui qui cherche à prêcher Christ. Étienne voyait les choses autrement. Il avait compris un principe que Paul énoncera plus tard. Commentant l’histoire troublée d’Israël dans le désert, l’apôtre des païens écrit à l’église également troublée de Corinthe : « Ces choses leur sont arrivées pour servir d’exemples, et elles ont été écrites pour notre instruction, à nous qui sommes parvenus à la fin des siècles. » (1 Corinthiens 10.11)
L’expression : « Ces choses », désigne l’histoire d’Israël. Pour l’apôtre, cette histoire ancienne et mystérieuse a été consignée sous les directives du Saint-Esprit pour notre instruction et notre profit, nous à qui le Christ serait annoncé un jour.
Hébreux 3.5 énonce la même vérité : « Pour Moïse, il a été fidèle dans toute la maison de Dieu, comme serviteur, pour rendre témoignage de ce qui devait être annoncé [sous l’Évangile]. » On peut encore mentionner Romains 15.4 dans ce cadre. Penchons-nous donc sur le principe qu’Étienne suit dans son sermon devant le sanhédrin juif.
Christ dans la promesse
Étienne commence par poser un fondement, à savoir la promesse de Dieu à Abraham, qui fut scellée par « l’alliance de la circoncision » (v.5-8). Il rappelle à ses auditeurs que leur identité nationale juive repose sur le fait qu’ils sont héritiers de cette promesse. En effet, le point culminant de la promesse de Dieu à Abraham résidait dans la « descendance » promise, en qui toutes les familles de la terre seraient bénies, cette descendance qui est Christ (Galates 3.16).
L’auditoire d’Étienne était assez versé dans les Écritures pour saisir les implications messianiques de la promesse divine. Que les Juifs l’aient compris ainsi ou non, ils reçurent une indication claire que ce sermon se focalisait sur la réalisation de la promesse dans le Christ à venir. A ce point et en toute logique, Étienne aborde le trait dominant de son discours : la jalousie et le rejet par leurs frères juifs de ceux que Dieu choisit et envoie tout au long de l’histoire. Ce rejet préfigure évidemment celui dont le Christ promis fit l’objet, et il culmine en lui.
Christ et Joseph
Ce thème apparaît dès le verset 9 où Étienne raconte comment Joseph fut jalousé et rejeté par ses frères. « Mais Dieu fut avec lui, et le délivra de toutes ses tribulations » (v.10). Telle est la vérité dominante : c’est bien Dieu qui a suscité ceux que les Juifs rejettent. On voit déjà clairement se profiler Jésus de Nazareth. De plus, Joseph ne fut pas seulement élevé au poste de haut dignitaire en Égypte, mais ses frères (et anciens ennemis) l’accueillirent comme quelqu’un revenu d’entre les morts. Après s’être fait reconnaître d’eux, Joseph les sauva de la famine et de la mort ‘v.13-14). Là encore, le public d’Étienne ne saisit probablement pas la perspective messianique de ce récit. Elle était pourtant tout à fait présente à l’esprit du prédicateur, comme nous le verrons.
Étienne rappelle ensuite comment les paroles de Dieu à Abraham concernant l’asservissement d’Israël en Égypte et sa libération s’accomplirent littéralement (comparer les v.6-7, et 17-19). Ceci étant, la promesse concernant la « descendance » ne devait-elle pas s’accomplir elle aussi ?
Christ et Moïse
Étienne aborde ensuite la partie la plus longue de son discours, l’histoire d’Israël sous Moïse (v.20 et suivants). Il commence par décrire la triste condition d’Israël en Égypte, et présente Moïse comme un enfant « beau aux yeux de Dieu » et rempli de sagesse. C’était aussi un homme « puissant en paroles et en œuvres », une expression que les premiers disciples utilisaient pour décrire Jésus, « un prophète puissant en œuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple » (Luc 24.19). Mais Étienne souligne surtout le fait que, comme Joseph, Moïse fut rejeté par ses frères : « Il pensait que ses frères comprendraient que Dieu leur accordait la délivrance par sa main ; mais ils ne comprirent pas » (v.25). Le prédicateur insiste alors : « Ce Moïse, qu’ils avaient renié… c’est lui que Dieu envoya comme chef et comme libérateur » (v.35).
Les auditeurs commencèrent probablement à ce point à voir où Étienne voulait en venir. Il ne se contentait pas simplement de rappeler l’histoire de la nation, mais il démontrait surtout que les Juifs avaient systématiquement rejeté ceux que Dieu leur avait envoyés dans le cours de leur histoire pour les sauver. Néanmoins, en vertu de sa grâce souveraine, Dieu avait soutenu ces libérateurs rejetés pour sauver le peuple en dépit de son péché (v.36). Chacun préfigurait admirablement le Christ à venir.
Christ et la loi
Israël ne rejeta pas seulement les « sauveurs » que Dieu suscitait, mais aussi sa loi. Moïse « reçut des oracles vivants, pour nous les donner. Nos pères ne voulurent pas lui obéir, ils le repoussèrent, et ils tournèrent leur cœur vers l’Égypte » (v.38-39). Pourtant, chose surprenante, le Seigneur ne les rejeta pas. Dans sa miséricorde, il fit entrer le peuple dans la terre promise sous la conduite de Josué, lui-même un « sauveur » et remarquable type de Christ (v.45). Les Israélites entrèrent en Canaan accompagnés aussi par le tabernacle, signe visible de la présence de Dieu au milieu d’eux. Mais ils ne comprirent pas ce signe, ni le symbolisme du temple qui le remplaça. Ils ne comprirent pas que « le Très-Haut n’habite pas dans ce qui est fait de main d’homme » (v.48). Ils rejetèrent donc une fois de plus la précieuse vérité que celui qui avait « habité » parmi eux est le vrai temple. Ils l’avaient détruit, mais ils l’avaient aussi vu se relever trois jours plus tard (Jean 2.19).
Christ et les prophètes
Dans sa dernière accusation, Étienne reproche aux Juifs d’avoir rejeté les prophètes « qui annonçaient d’avance la venue du Juste » (v.52). Leur attitude impie trouva son apogée dans leur crime suprême, le rejet, la trahison et le meurtre du vrai Libérateur dont les prophètes avaient tous parlé (v.52).
Nous ignorons ce qu’Étienne avait encore l’intention de dire à ses auditeurs. Il est probable que, comme Pierre au jour de la Pentecôte, il leur aurait dit qu’en dépit de leur méchanceté, Dieu avait ressuscité Jésus d’entre les morts et l’avait fait « Seigneur et Christ ». Puis il aurait certainement ajouté qu’en son nom, ils pouvaient recevoir « la rémission des péchés » et « le don du Saint-Esprit » (Actes 2.36-38). Après tout, tel est bien le message que son sermon martèle continuellement : Dieu suscite des sauveurs pour délivrer ceux qui les ont rejetés autrefois. Étienne aurait certainement tenu ces propos, mais les Juifs ne lui en donnèrent pas l’occasion et le mirent à mort.
A première vue, le sermon d’Étienne semble n’être qu’un rappel de l’histoire juive. Mais en l’examinant de plus près, nous voyons qu’il trouvait dans ce déroulement historique un schéma récurrent qui préfigure Christ avec une clarté surprenante. Dans ce schéma, le peuple de Dieu connaît la détresse, est sur le point de mourir de faim en Canaan, de rude oppression en Égypte, de privations dans le désert. Chaque fois, Dieu lui envoie un sauveur. Mais le peuple rejette ce dernier, ainsi que son message. Il rejette également les législateurs et les prophètes qui proclament le salut à ceux qui ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre.
Et chaque fois, Dieu passe outre le rejet ! Il élève celui que le peuple rejette et lui confère une autorité en vertu de laquelle il sauve ceux-là mêmes qui se rebellent contre lui. Étienne utilise en somme l’histoire juive pour préfigurer et proclamer Christ rejeté, crucifié, ressuscité et « élevé par [la] droite [de Dieu] comme Prince et Sauveur, pour donner à Israël la repentance et le pardon des péchés » (Actes 5.31).
Si Étienne est en mesure de prêcher Christ à partir de l’histoire juive, nous le pouvons également, et même à partir de n’importe quelle autre portion de la Parole de Dieu de l’Ancien Testament qui peut paraître obscure à première vue. Nous avons pour cela la ferme approbation de la pratique néotestamentaire.
Edgar ANDREWS
www.batissezvotrevie.fr
Écrire commentaire
Pacco (dimanche, 27 décembre 2020 12:19)
Merci