LA COREDEMPTION DE MARIE
Le fait unique de la Rédemption par un Rédempteur unique est affirmé dès avant la naissance de Jésus par les prophètes et prévu par Dieu de toute éternité (1 Pierre 1.18- 20) et sitôt après sa naissance (Luc 2.11). Ainsi il est proclamé Sauveur et Seigneur et il confessera lui-même sa vocation exceptionnelle en particulier lors de sa présence imprévue par les siens, au Temple, à l'âge de 12 ans. A ses parents inquiets, il répondra : « ne savez-vous pas qu'il faut que je m'occupe des affaires de mon Père? ». Ses parents ne comprirent rien à ses paroles, remarque Luc 2.50, pas plus qu'ils ne comprendront vingt ans plus tard, tout au début du ministère de Jésus en le déclarant « hors de sens » et désirant le réduire au silence (Marc 3.21). Dans Jean 7.5, les frères de Jésus partagent l'incrédulité de leurs parents. Enfin, il n'est pas invraisemblable d'imaginer Marie, au pied de la Croix de son Sauveur, anéantie, brisée, le cœur rempli d'ignorance et de douleur conformément à la prophétie de Siméon... « une épée te transpercera l'âme (Luc 2.35). C'est cette très humble et très obéissante servante du Seigneur qui cependant a osé donner un ordre aux serviteurs à Cana (Jean 2.5)... : seule et unique parole tombée de ses lèvres et relevée par le Saint-Esprit pour être précieusement gardée dans l’Écriture : « Faites ce que Jésus vous dira » (1), affirmant ainsi la primauté des paroles du Christ et son unique pouvoir.
Or l’Église romaine en a fait la corédemptrice.
En effet le Pape Paul VI a proclamé sur la place Saint-Pierre à Rome, à l'occasion de la clôture de l'année de la Foi, le 30 juin 1968, un Credo dont nous extrayons les lignes suivantes : « Nous croyons que la Très Sainte Vierge de Dieu, nouvelle Eve, mère de l’Église, continue au ciel son rôle maternel à l'égard des membres du Christ, en coopérant à la naissance et au développement de la vie divine dans les âmes des rachetés » (2).
Le deuxième Concile du Vatican a confirmé : « cette maternité de Marie dans l'économie de la grâce se continue sans interruption jusqu'à la consommation définitive de tous les élus. En effet, après son Assomption au ciel son rôle dans le salut ne s'interrompt pas : par son intercession répétée elle continue à nous obtenir les dons qui assurent notre salut éternel : c'est pourquoi la Bonne Vierge est invoquée dans l'Église sous les titres divers comme : Avocate – auxiliatrice – secourable – médiatrice »...
Le théologien catholique par excellence, Thomas d'Aquin (1225-1274), n'aurait pas accepté l'Immaculée Conception de la Vierge (dont on parlait déjà) (3) et le Père Congar pose la question : « Peut-on dire que la Vierge est distributrice de toutes les grâces ? Nous n'avons pour l'affirmer aucun texte de l'Écriture, aucune autorité patristique ou ecclésiastique » (4). Malgré ce, la hiérarchie catholique a voulu depuis le quatrième et cinquième siècle placer, auprès de la Divinité redoutable et justicière « une figure moins inexorable, plus douce et d'essence maternelle (5) revitalisant ainsi au cours des âges les mites païens d'Isis et de Persée. « Dieu s'est humanisé en Jésus. Il a achevé son humanisation en Marie. C'est par la Vierge, pour une grande part, que l’Église jouit de son extraordinaire puissance de résorber le mal et de le tourner en bien. La conversion est une des spécialités de la Vierge et il est remarquable que la plupart des convertis ont pour elle une particulière tendresse » (6).
On pourrait se demander par quelle autorité l'église catholique se substitue à l’Écriture ? - « … quand sur un point de la doctrine les textes sont muets ou trop succincts il est normal que les croyants s'attachent à combler la lacune, à suppléer l'insuffisance des documents (7) d'où cette vérité qui donne la primauté à la Tradition sur l'Écriture : « On accède au Père par son Fils et au Fils par sa Mère (8)... et cela est vrai pour les catholiques même si l'Écriture déclare que nous n'avons qu'un Avocat auprès du Père... seul Médiateur entre Dieu et les hommes. Jésus-Christ... médiateur de la nouvelle alliance (1 Jean 2. ; 1 Timothée 2.5 ; Hébreux 12.24).
Il apparaît donc au lecteur impartial de la Bible que la mariologie et sa conséquence outrageante pour le Seigneur – la corédemption de la Vierge – « est une excroissance, une forme maladive de la pensée théologique. De telles excroissances doivent être amputées. Il s'agit d'un autre Évangile (9) : autre Évangile venu du fond des âges, inspiré par l'ascétisme païen et juif qui dès le quatrième siècle pénètre l'Église imposant entre autre le célibat des prêtres et provoquant ainsi les refoulements sexuels inévitables, inspirant le culte de la femme avec les romans courtois et les chansons de gestes, s'extériorisant enfin dans la Chevalerie, les Croisades, autre source de problèmes sexuels, magnifiant enfin... la Dame, la Mia Donna ou Madone » (10).
L'hérésie catholique apparaît aujourd'hui comme une évidence. Elle est réellement une perversité de la vérité révélée. Nous le déclarons avec charité mais fermeté, le système catholique, tout en affirmant avoir fait quelques pas vers une Réforme de structures et de pratiques ne cesse d'accentuer, avec une superbe et une volonté infrangibles le fossé qui le sépare de l’Écriture Sainte.
Le lecteur catholique de la Bible, dont la lecture est maintenant encouragée et même pratiquée en chaire dans bien des églises peut se demander, et d'autres avec lui, si le Christianisme dans son ensemble ne vit pas aujourd'hui les conditions morales et spirituelles qui ont provoqué la Réforme du XVIe siècle. Pourtant nos ancêtres ont fait cette réforme sans avoir à combattre les apports humains et païens de l'Immaculée Conception, de l'Infaillibilité du Pape, de l'Assomption et de la Corédemption de la Vierge. Ils eurent néanmoins assez de motifs pour vouloir obéir à Dieu et à sa Révélation plutôt qu'aux hommes... Ils ne purent autrement...
Aujourd'hui la Mariologie qui n'a pas encore atteint ses conséquences inéluctables témoigne d'une impossibilité absolue, pour notre conscience de croyants bibliques non seulement d'envisager une union organique avec l'Église catholique… mais même un rapprochement sentimental, de convenance ou d’opportunité stratégique, au plan doctrinal avec elle. Le christianisme catholique est une pyramide trinitaire mais à quatre faces. Il nous faut choisir entre la Madone portant son bambino dans les bras et le Christ seul, serrant sur son cœur la brebis perdue et retrouvée. Peut-être s’agit-il de toi, cher lecteur.
F. MARSAULT
www.batissezvotrevie.fr
(1) Soumis à cet ordre de Marie, les fils de la Réforme sont fidèles à Marie et bien plus respectueux de la Vierge que les catholiques qui font si souvent ce que Jésus n’a jamais enseigné.
(2) Extrait de « Tempête sur l’Église » de Robert Serrou.
(3) Catholicisme et Protestantisme – Lettre pastorale du Synode Général de l’Église Réformée des Pays-Bas sur l’Église Catholique Romaine – édition « La Revue Réformée » 1952, p.23.
(4) « Christ – Marie et l’Eglise » du Père Congar.
(5) La Vierge : essai sur la naissance de son culte, Colette Yver – Flammarion 1932. Il y est aussi question de la corédemption du genre humain par la vierge, p.213.
(6) Extraits des « Cahiers de la Vierge », n.8 A.D. Sertillanges – éditions du Cerf, 1936.
(7) Daniel Rops, déclaration du 28-10-50.
(8) Cardinal Feltin à Chartres le 27 mai 1952.
(9) Du théologien réformé Karl Barth.
(10) Ce paragraphe est très remarquablement développé dans le livre du professeur Giovanni Miegge « La Vierge Marie ».
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