Cet article de Charles SPURGEON fait suite à « N’avez-vous pas lu ? » (du même auteur) que vous retrouverez dans la rubrique « Edification » [NDLR]
COMPRENEZ CE QUE VOUS LISEZ
Il va sans dire que nous devons lire les Ecritures. Il faut que nous nous nourrissions de la vérité de l'Ecriture Sainte. Est-il besoin de demander si vous lisez votre Bible? De nos jours, hélas, on lit des revues, des journaux et des périodiques, mais on néglige la Bible. Autrefois, il n’y avait pas beaucoup de livres, mais on trouvait, dans la Bible seule, toute une bibliothèque. Et avec quelle avidité les gens la lisaient-ils...
Combien les sermons modernes sont vides de l’Ecriture, comparés aux sermons des Puritains, ces maîtres de la théologie! On peut dire que chacune de leurs phrases apportait des éclaircissements sur un texte de l‘Ecriture, lorsqu'ils prêchaient. Et ce n'était pas seulement le texte choisi comme sujet du sermon, mais bien d'autres encore qui étaient présentés sous un jour nouveau. Plût à Dieu que les pasteurs se conformassent plus étroitement au bon vieux Livre! S'il en était ainsi, nos prédications seraient instructives, même si nous n’étions pas au courant de la « pensée contemporaine », ou si nous n’étions pas tout à fait « à la page ». Quant à vous qui n‘avez pas à prêcher, la meilleure nourriture à vous recommander est la Parole de Dieu elle-même. Sermons et livres ont du bon, mais les rivières qui coulent pendant longtemps à la surface du sol ramassent petit-à-petit quelques échantillons des terrains qu'elles traversent et perdent la fraîcheur qu’elles possédaient à leur source. Il vaut toujours mieux boire à la source qu’au réservoir. Vous constaterez que lire la Parole de Dieu pour vous-même — mais la lire elle plutôt que des commentaires sur la Parole — est le moyen le plus sûr de croître dans la grâce. Buvez le lait pur de la Parole de Dieu, et non pas le lait écrémé ou le lait coupé d’eau de la parole des hommes.
Nous voulons dire par là que ce que l'on prétend généralement être la lecture de la Bible, ne l'est guère en réalité. Les versets défilent sous nos yeux et les phrases glissent dans notre tête, mais il n'y a pas eu réellement lecture. Un vieux prédicateur avait coutume de dire: « De nos jours, la Parole ne trouve aucune opposition auprès de bien des gens, parce qu'elle entre par une oreille et en sort par l'autre. » Il semble en être de même pour certains lecteurs — ils sont en mesure de lire énormément, parce qu'ils ne lisent rien. L’œil parcourt rapidement le texte, tandis que l'esprit ne se fixe jamais. L'âme ne s'épanouit pas au contact de la vérité. Elle ne s'y attarde pas. Elle voltige à travers le paysage, comme le ferait un oiseau, mais elle ne se fait pas un nid et ne trouve point de repos pour son pied! Lire de cette façon équivaut à ne pas lire du tout. Comprendre le sens, voilà le propre d’une vraie lecture.
Dans la prière, il y a un élément qu’on appelle prier « avec des prières » — une façon de prier qui constitue la partie essentielle de la prière. De même, dans la louange il y a une manière de louer « avec des cantiques », née d'un feu intérieur de consécration intense, une vie remplie d’alléluias! Il en va de même pour la lecture des Ecritures Saintes. Il existe une lecture intérieure, une lecture qui va jusqu’au fond des choses, une lecture véritable et vivante de la parole. C'est ce qui constitue l'âme de la lecture. Et, si cet élément est absent, la lecture n'est plus qu’un exercice machinal, sans aucun profit.
Si nous ne comprenons pas ce que nous lisons, nous n’avons pas vraiment lu; l'élément essentiel de la lecture est absent. Il nous arrive souvent de condamner les catholiques parce qu'ils ont leurs services religieux quotidiens en latin; mais pourquoi ne pas utiliser le latin plutôt que toute autre langue, si de toute façon les gens ne comprennent pas? Certains se consolent à la pensée qu’en ayant lu un chapitre, dont le sens leur a totalement échappé, ils ont fait quelque chose de bien. Mais notre bon sens lui-même ne rejette-t-il pas cela comme étant de la superstition? Si vous mettiez votre livre la tête en bas et que vous passiez le même temps à parcourir les caractères dans cette position, vous seriez aussi avancés que si vous le lisiez sans rien y comprendre. Lire le Nouveau Testament en grec ne fera pas grand bien à la plupart d'entre vous: vous n’y verrez que du grec! . . . mais l'effet sera identique si vous le lisez en français, à moins que vous ne lisiez avec un cœur qui comprenne.
Ce n’est pas la lettre qui sauve l'âme; la lettre tue de bien des façons, sans jamais donner la vie. Si vous revenez continuellement à la lettre seule, vous serez tentés de vous en servir comme arme contre la vérité, comme autrefois les pharisiens; votre connaissance de la lettre engendrera de l’orgueil en vous, et cela vous mènera à votre perte. C’est l'esprit, le sens intime, qui — en imbibant notre âme — est pour nous une source de bénédiction et de sanctification. Nous nous imprégnons de la Parole de Dieu comme la toison de Gédéon s'imbibait de rosée, mais à une condition, c'est que nous la recevions dans nos esprits et dans nos cœurs, en l'acceptant comme la vérité même de Dieu, et en la comprenant de telle sorte qu’elle devienne l’objet de nos délices. Ainsi, nous serons en mesure de la comprendre, ou alors c'est que nous ne l’aurons pas lue comme il faut.
Il est évident que la lecture ne fera du bien à l’âme que si celle-ci la comprend. Il faut qu'il y ait connaissance de Dieu pour qu’il puisse y avoir amour pour Dieu. Il faut qu’il y ait quelque connaissance des choses de Dieu, telles qu'elles sont révélées, afin que l'on puisse en jouir. Nous devons essayer de discerner, dans la mesure où nos esprits bornés peuvent le saisir, ce que Dieu veut dire par « ceci », et ce qu'il veut dire par « cela »; sans quoi il ne nous est possible que d'inventorier le Livre, sans en aimer le contenu. Nous pouvons révérer la lettre et pourtant ne pas être vraiment dévoués au Seigneur qui nous parle par ces paroles. Vous ne trouverez jamais de directives pour votre vie dans ce que vous ne saisissez pas. Ce que vous ne comprenez pas ne peut avoir aucune portée d'ordre pratique sur votre caractère.
(à suivre : « esprits éveillés »
Charles SPURGEON
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